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LE DISCOGLOSSE

PEINT

Le discoglosse peint est une espèce d’amphibien originaire du Nord de l’Algérie, de la Tunisie et des iles de Sicile, Malte et Gozo. Son nom latin est Discoglossus pictus.

Les discoglosses ont pour caractéristiques de posséder des pupilles cordiformes (ou bien en gouttes d’eau renversées). Une langue en forme de disque (à l’origine de leur nom). Un museau assez plat et pointu et une tâche claire triangulaire sur la tête dont la base rejoint  les deux yeux. Cependant leur coloration est très variable et plusieurs types de morphe peuvent être observés.

 

Deux populations suffisamment différenciées sont reconnues et constituent des sous-espèces :Discoglossus pictus auritus et  Discoglossus pictus pictus.

Toutes les espèces de discoglosses sont endémiques à la méditerranée (c'est-à-dire qu’on ne les trouve nulle part ailleurs dans le monde) et appartiennent à une famille d’amphibien très ancienne qui ne compte plus que douze espèces aujourd’hui.

En France continentale, il n’y a originellement pas d’espèce de discoglosse à l’état sauvage. Seule la Corse héberge deux espèces assez proches : le discoglosse Sarde et le discoglosse Corse. Cependant, en 1906, un naturaliste du nom de Wintrebert découvre sur la commune de Banyuls-sur-Mer, dans les Pyrénées-Orientales, quelques individus appartenant à cette espèce. Ces individus appartiendraient-ils à une petite population de discoglosses peints indigènes jamais découverte ?

La réponse n’est établie que bien plus tard, suite à l’étude de nombreux récits et ouvrages de naturalistes qui attestent qu’avant même cette époque, de très nombreuses tentatives d’introduction d’espèces avaient lieu. Ainsi, il est fort probable que ce soit donc des naturalistes qui en soient responsable puisque d’autres introductions délibérées et documentées de discoglosses peints ont eu lieu en France au XX siècle, notamment à Paris, dans l’Indre, l’Indre-et-Loire, le Val-de-Marne et le Gard.

Ce n’est que bien des années plus tard, grâce à l’amélioration des techniques et outils scientifiques que la certitude quant-à l’origine de ces individus est établie : Ils sont originaires d’Algérie et appartiennent donc à la sous-espèce auritus !

Cependant, entre   la découverte de ces individus et l’établissement formel de leur origine, les petits discoglosses peints introduits ne sont pas restés à Banyuls et ont commencés à se propager en Catalogne de part et d’autre du littoral méditerranéen, et même vers l’intérieur des terres, atteignant des altitudes jamais renseignées pour cette espèce !

 

 

Le discoglosse peint est assez discret du fait de ses mœurs principalement nocturnes. Il peu passer inaperçu aux yeux des non initiés car il se comporte un peu comme une grenouille en plongeant dans l’eau à l’approche d’un danger. Il remonte alors en surface et ne laisse immerger que ses yeux et ses narines afin de pouvoir respirer et surveiller en toute discrétion.

En France et en Espagne, il est peu regardant quant à son habitat et se contente d’une grande variété de zones humides plus ou moins temporaires et modifiées par l’Homme, voire même, légèrement saumâtre. Néanmoins il se satisfait presque exclusivement des zones de basses altitudes et demeure rare au dessus de 400 mètres dans notre département bien que ça reproduction soit avérée jusqu’à 1250 mètres d’altitude !

Ces caractéristiques ont permis à l’espèce de coloniser très rapidement ce nouveau territoire qui s’offrait à eux : ainsi, la progression du Discoglosse depuis son introduction au début du XX siècle à été très rapide en Languedoc-Roussillon comme en témoigne la carte des observations ci-dessous.

Il en va de même pour la Catalogne Sud où l’espèce est maintenant bien implantée le long du littoral jusqu’au Nord-Est de la province de Barcelone. Une population est également connue en banlieue Sud-Ouest de Barcelone depuis 2004, ce qui constitue une progression de près de 100Km par rapport au front de progression de l’espèce.

Cette progression est due principalement aux individus immatures qui peuvent effectuer des déplacements assez importants par temps pluvieux et à la grande capacité de reproduction de l’espèce. En effet, la période de reproduction s’étend de janvier à juillet et une femelle à une fécondité de 6 000 œufs par an, ce qui est bien plus que la plupart des amphibiens autochtones. La maturité sexuelle est atteinte au bout d’un an, ce qui est assez rapide également.

En Espagne, il a ainsi été  montré que le discoglosse peint avait une vitesse de progression d’environ 2,7 km/an le long du littoral et 1,1 km/an vers l’intérieur des terres. Ces chiffres sont sans doute très proche en France, bien qu’aucune étude n’ai été menée sur le sujet.

 

Dans les Pyrénées-Orientales une étude montre que le Discoglosse peint, à l’inverse des autres amphibiens autochtones, se nourrit d’une proportion de mollusques beaucoup plus importante (> 20 % contre 2 % pour les autres amphibiens) et d’une plus faible proportion d’insectes (< 50 % contre > 70 % pour les autres amphibiens). L’impact sur les populations de mollusques n’a pas été étudié spécifiquement mais l’arrivée du discoglosse dans certaine région pourrait perturber certains écosystèmes, voire peut-être, menacer certaines espèces endémiques de mollusques présentes dans ces départements (plusieurs espèces dans l’Hérault par exemple).

De plus, il a été montré en Espagne, qu’en présence de Discoglosse peint, le Crapaud calamite (Bufo calamita) et le Pélodyte ponctuée (Pelodytes punctatus) sont affectés pendant la période de reproduction. En effet, les têtards de ces deux espèces présentent une mortalité plus importante et un taux de croissance plus faible tandis que ceux du Discoglosse peint sont plus grands et se développent plus vite en leur présence. Ces résultats, ajoutés à la forte capacité de colonisation de l’espèce sont en faveur de son classement en tant qu’espèce exotique envahissante.

Sachant que le Discoglosse peint à été trouvé en France, en coexistence avec au moins douze espèces d’amphibiens, il est important de mener de nouvelles études sur des sites qui pourraient être prochainement colonisés par l’espèce afin d’y mesurer l’impacte de l’arrivée du Discoglosse et de chercher d’éventuels moyens de lute contre sa progression si cela s’avère nécessaire.

Il est à noter que la capacité de colonisation de l’espèce pourrait être due à un type de morphe particulier. En effet, lors des différentes prospections qui ont eu lieu en France, les trois morphes ont pu être observés dans les Pyrénées-Orientales tandis que seul le morphe ocellé semble être présent dans l’Aude et dans l’Hérault, les deux départements ayant été colonisés très rapidement ces dernières années. Cela pourrait être lié à un avantage adaptatif propre au morphe ocellé mais n’étant pas encore élucidé à ce jour.

 

 

Le cas du Discoglosse peint est particulier puisqu’il est protégé par la loi française et européenne tout en étant classé dans la liste rouge des amphibiens et reptiles de France comme étant une espèce exotique envahissante. Il est donc judicieux de rechercher dès à présent des solutions pour lutter contre cette espèce si la situation juridique de celle-ci venait à évoluer et à autoriser la régulation de cette espèce.

En effet, même si le discoglosse peint n’a pas un impacte aussi important que celui de la grenouille taureau, il se peut que celui-ci soit plus important que ce qui a pu déjà être montré et la rapidité de sa progression pourrait l’amener à entrer en compétition avec d’autres espèces indigènes qui seront peut-être plus sensible à sa présence que celles déjà impactées.

 

On peut imaginer différentes actions à mettre en oeuvre pour limiter ces impactes :

- La capture des individus immatures qui propagent l’espèce, afin d’enrayer sa dispersion.

- Le piégeage des adultes.

- Le prélèvement puis la destruction des pontes durant la période de reproduction.

 

Cependant d’autres études sont nécessaires afin de préciser les réels impacts de cette espèce sur la faune autochtone car ceux-ci restent peu documentés.

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